Rétrogradation et mutation
Mise à jour : 02 mai 2022Comme les salariés non protégés, le salarié protégé peut refuser une sanction qui modifie son contrat de travail sans que ce refus ne soit considéré comme fautif. Mais contrairement aux autres salariés, il peut également refuser une modification des conditions de travail d'un salarié est légitime. Face à ce refus, l'employeur peut décider de le maintenir dans les conditions initiales ou de saisir l'inspecteur du travail afin de le licencier.
Le salarié protégé peut-il refuser une modification de son contrat de travail ?
Comme pour tout salarié, l'employeur ne peut pas imposer de modification de son contrat de travail au salarié protégé, même pour un motif disciplinaire Cass. soc., 25 nov. 1997, no 94-42.727. Le salarié est en droit de la refuser. Dans ce cas, l'employeur devra poursuivre le contrat aux conditions initiales ou saisir l'inspecteur du travail et engager une procédure de licenciement du salarié (voir §).
Attention
Si l'employeur met en œuvre une modification du contrat de travail malgré le refus du salarié protégé, celui-ci peut invoquer le délit d'entrave Cass. crim., 4 janv. 1990, nº 88-83.311. L'employeur risque une amende ainsi qu'une peine d'emprisonnement.
L'inspecteur du travail doit-il être informé de la rétrogradation ou de la mutation ?
Il n'y a pas d'obligation d'informer l'inspecteur du travail de la rétrogradation ou de la mutation disciplinaire du salarié protégé dans le Code du travail. Cependant, il peut être préférable d'informer l'inspecteur du travail, notamment si le salarié refuse la sanction et que l'employeur décide de le licencier ou dans l'éventualité d'une récidive appelant à une sanction plus lourde.
Que se passe-t-il si le salarié protégé refuse une modification de ses conditions de travail ?
L'employeur ne peut pas imposer de modification des conditions de travail à un salarié protégé Cass. soc., 14 nov. 2000, nº 99-43.270. Ainsi, la mutation d'un salarié protégé par application d'une clause de mobilité (ou dans le même secteur géographique) ne peut pas être mise en œuvre sans son accord Cass. soc., 23 sept. 1992, nº 90-45.106.
Si le salarié la refuse, l'employeur doit poursuivre le contrat aux conditions antérieures ou engager la procédure de licenciement en saisissant l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement (Cass. soc., 15 févr.2006, nº 03-42.510). Le refus d'une modification des conditions de travail peut constituer un manquement d'une gravité suffisante pour que l'inspecteur du travail autorise le licenciement CE, 14 nov. 2008, no 306226. En revanche, ce refus est légitime si le changement des conditions de travail porte atteinte à l'exercice normal de son mandat de représentant CE, 29 dec. 2000, nº 207613.
Quels éléments sont contrôlés par l'inspecteur du travail ?
L'inspecteur du travail contrôle la proportionnalité de la sanction. Les faits à l'origine de la rétrogradation ou de la mutation disciplinaire doivent donc impérativement justifier le licenciement. Autrement, le licenciement du salarié protégé risque de ne pas être accordé.
Il examine le refus du salarié compte tenu de l'échelle des sanctions applicables dans l'entreprise et non au regard des seuls faits invoqués par l'employeur pour estimer si les faits sont de nature à justifier le licenciement CE, 3 juill. 2013, no 348099.
Comment s'effectue la demande d'autorisation du licenciement ?
La demande d'autorisation doit indiquer :
- les mandats du salarié. L'ensemble des mandats du salarié doivent impérativement être mentionnés CE, 20 mars 2009, no 309195
- les motifs du licenciement. L'employeur doit préciser qu'un licenciement est envisagé suite au refus du salarié d'accepter la sanction qui modifie son contrat de travail. Il doit indiquer les raisons qui l'ont conduit à modifier le contrat de travail et motiver le licenciement par les faits ayant entraîné la rétrogradation ou la mutation disciplinaire CE, 6 mai 1996, nº 147250.
L'autorisation de l'inspecteur du travail est-elle nécessaire si le salarié devient salarié protégé au cours de la procédure disciplinaire ?
Oui, si entre le moment où il refuse une mutation disciplinaire (ou une rétrogradation) et la convocation à un second entretien préalable en vue d'un licenciement le salarié acquiert la qualité de salarié protégé et que l'employeur en a été informé, le licenciement doit être soumis à l'autorisation préalable de l'inspection du travail Cass. soc., 13 mai 2014, no 13-14.537.
Le refus de la rétrogradation ou de la mutation disciplinaire par le salarié protégé peut-il justifier le licenciement ?
Non, le licenciement d'un salarié protégé doit être justifié par les faits à l'origine de la sanction modifiant le contrat de travail et non par le refus de cette sanction par le salarié Cass. soc., 25 mars 2009, no 07-40.035.
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Rétrogradation et mutation : la procédure
Si l'employeur met en œuvre une modification du contrat de travail malgré le refus du salarié protégé, celui-ci peut invoquer le délit d'entrave (Cass. crim., 4 janv. 1990, nº 88-83.311). L'employeur risque une amende ainsi qu'une peine d'emprisonnement.
Jurisprudence
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 3014 du 23 septembre 1992, Pourvoi nº 90-45.106
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 4387 du 25 novembre 1997, Pourvoi nº 94-42.727
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 4585 du 14 novembre 2000, Pourvoi nº 99-43.270
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 624 du 25 mars 2009, Pourvoi nº 07-40.035
Cour de cassation, Chambre criminelle, Arrêt du 4 janvier 1990, Pourvoi nº 88-83.311
Conseil d'État, Section du contentieux, 8ème Sous-section, Décision nº 147250 du 6 mai 1996
Conseil d'État, Section du contentieux, 8ème Sous-section, Décision nº 207613 du 29 décembre 2000
Conseil d'État, Section du contentieux, 4ème Sous-section, Décision nº 306226 du 14 novembre 2008
Conseil d'État, Section du contentieux, 4ème Sous-section, Décision nº 309195 du 20 mars 2009
Conseil d'État, Section du contentieux, Sous-section réunies, Décision nº 348099 du 3 juillet 2013
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 873 du 13 mai 2014, Pourvoi nº 13-14.537