Inaptitude
Mise à jour : 12 avril 2023L'employeur doit proposer au salarié un emploi approprié aux capacité du salarié, disponible, aussi comparable que possible à son précédent poste et conforme aux préconisations du médecin du travail. Ce n'est qu'en le justifiant par écrit que l'employeur peut s'exonérer de suivre précisément les avis, indications ou propositions du médecin du travail. Enfin, l'employeur peut limiter ses recherches si le salarié a exprimé clairement une position en ce sens.
Quels emplois doivent être proposés au salarié ?
Emploi approprié aux capacités du salarié. L'employeur doit rechercher des emplois qui peuvent être occupés par le salarié compte tenu de ses capacités physiques ou mentales, telles qu'établies par le médecin du travail.
Remarque
Si le poste proposé au salarié n'est pas approprié à ses capacités, l'employeur ne peut pas ensuite lui reprocher une insuffisance professionnelle pour le licencier Cass. soc., 7 mars 2012, no 11-11.311.
Emploi disponible. Le reclassement doit être effectué sur un emploi disponible, c'est-à-dire :
- un emploi vacant en attente d'être pourvu
- ou un emploi qui pourrait être rendu vacant par une permutation de poste, sous réserve d'obtenir l'accord du salarié avec lequel la permutation intervient
- ou encore un emploi temporairement disponible, tel qu'un CDD Cass. soc., 4 sept. 2019, no 18-18.169, même s'il s'agit d'un CDD de remplacement Cass. soc., 5 mars 2014, no 12-24.456.
Remarque
En revanche, l'employeur n'a pas à proposer comme poste de reclassement les tâches confiées à un stagiaire, quand bien même ces tâches seraient compatibles avec les capacités du salarié. Sauf, toutefois, si le salarié démontre que l'employeur a eu recours de manière frauduleuse à des stagiaires pour exécuter des tâches correspondant à un poste de travail permanent Cass. soc., 11 mai 2017, no 16-12.191.
Emploi aussi comparable que possible au poste précédent. L'emploi proposé doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin en mettant en œuvre des mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail C. trav., art. L. 1226-2C. trav., art. L. 1226-10.
Exemple
La préconisation du médecin du travail d'organiser un travail à domicile peut constituer une transformation de poste que l'employeur doit alors mettre en œuvre en priorité Cass. soc., 15 janv. 2014, no 11-28.898.
Ce n'est que si un tel poste n'existe pas que l'employeur peut proposer des postes moins qualifiés mais, dans ce cas, le salarié est en droit de les refuser.
Attention
Le fait de procéder à un recrutement extérieur sur un poste compatible avec les préconisations médicales est une violation de l'obligation de recherche de reclassement Cass. soc., 30 avr. 2014, no 13-11.325.
Emploi conforme aux préconisations du médecin du travail. L'emploi proposé doit en outre être conforme aux conclusions écrites du médecin du travail et tenir compte de l'avis exprimé par le comité social et économique (voir question dédiée).
Comment engager la recherche d'un poste de reclassement ?
L'employeur doit engager des démarches précises en vue du reclassement du salarié Cass. soc., 6 janv. 2010, no 08-44.177.
Il est conseillé :
- avant l'avis d'inaptitude : d'échanger avec le médecin du travail sur l'avis qu'il compte adresser. L'entreprise a tout intérêt à avoir un dialogue constructif sur les postes qui pourraient être disponibles, avec ou sans adaptation du poste ou formation du salarié. Si le médecin le propose et si besoin, l'entreprise peut solliciter l'appui de l'équipe pluridisciplinaire du service de santé au travail ou d'un organisme compétent en matière de maintien dans l'emploi
- une fois l'avis d'inaptitude notifié :
- étudier les indications du médecin du travail sur le reclassement, voir question suivante
- chercher dans l'entreprise et dans le groupe (sauf étranger) les postes qui pourraient correspondre à ces indications, quitte à procéder à des transformations et adaptations des postes : voir question dédiée
- une fois que des postes de reclassement sont identifiés : faire valider ces propositions par le médecin du travail Cass. soc., 26 sept. 2012, no 11-14.742
- procéder à la consultation obligatoire du CSE sur le sujet, voir question dédiée
- soumettre les propositions de reclassement au salarié
Attention
Il doit s'agir d'une recherche effective : l'employeur ne peut se contenter de se prévaloir du fait que le registre du personnel ne fait pas mention des postes préconisés par le médecin du travail Cass. soc., 7 juill. 2016, no 14-18.877.
Astuce
L'employeur peut également solliciter l'aide d'organismes extérieurs tels l'Anact ou la Carsat pour effectuer ses recherches de reclassement.
L'employeur doit-il suivre les indications du médecin portées sur l'avis d'inaptitude ?
Oui. L'employeur a l'obligation de prendre en considération les avis, indications ou propositions formulées par le médecin du travail dans l'avis d'inaptitude (voir question suivante). Il peut toutefois ne pas les suivre s'il le justifie, par écrit, au salarié et au médecin du travail C. trav., art. L. 4624-6.
Attention
L'employeur doit effectuer ses recherches de reclassement en fonction des indications du médecin du travail C. trav., art. L. 4624-6Cass. soc., 15 janv. 2014, no 11-28.898. En cas de contentieux, il doit démontrer, soit qu'il a tenu compte des recommandations ou propositions du médecin du travail, soit qu'il était impossible de les suivre Cass. soc., 14 oct. 2009, no 08-42.878. Sinon les juges considèrent qu'il n'a pas respecté son obligation de reclassement.
Exemple
Si le médecin du travail demande une étude ergonomique, l'employeur qui licencie le salarié sans avoir fait procéder à cette étude n'a pas satisfait à son obligation de reclassement Cass. soc., 28 oct. 1998, no 96-44.395. Il en est de même si l'employeur licencie le salarié sans avoir procédé à l'essai préconisé par le médecin du travail Cass. soc., 14 juin 2016, no 14-17.032. Si le médecin du travail préconise un aménagement du poste de chef de chantier, l'employeur ne peut pas proposer un reclassement sur un poste de métreur sans prendre en compte en premier lieu l'aménagement du poste Cass. soc., 26 avr. 2007, no 06-41.541. De même, si le médecin du travail préconise un poste en télétravail et à temps partiel, l'employeur manque à son obligation de reclassement en refusant de se conformer à ces prescriptions, dès lors que le poste du salarié est compatible avec un tel aménagement Cass. soc., 29 mars 2023, no 21-15.472
Que doit indiquer le médecin du travail pour aider l'employeur dans ses recherches de reclassement ?
Le médecin du travail :
- doit éclairer son avis d'inaptitude de conclusions écrites, assorties d'indications relatives au reclassement du salarié
- il peut également :
- formuler des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté C. trav., art. L. 1226-2C. trav., art. L. 1226-10C. trav., art. L. 4624-4
- proposer à l'employeur l'appui de l'équipe pluridisciplinaire ou d'un organisme compétent en matière de maintien en emploi pour mettre en œuvre son avis et ses indications ou ses propositions C. trav., art. L. 4624-5.
Attention
Seul le médecin du travail est compétent : l'employeur ne peut pas s'adresser à un autre médecin pour obtenir des propositions en vue du reclassement du salarié Cass. soc., 28 juin 2006, no 04-47.672.
Remarque
Le médecin du travail ne se prononce pas seulement sur l'inaptitude du salarié à son emploi. Il porte un diagnostic sur les possibilités pour le salarié d'exercer des activités existantes au sein de l'entreprise. Pour ce faire, avant de rendre son avis, il étudie les spécificités et contraintes du poste du salarié, peut proposer des mesures individuelles (telles que des aménagements, adaptations ou transformations de poste) ou des mesures d'aménagement du temps de travail et doit échanger avec l'employeur et le salarié, voir question dédiée C. trav., art. L. 4624-3C. trav., art. L. 4624-4.
Que faire si l'avis du médecin du travail est sujet à interprétation ?
L'employeur doit demander par écrit des précisions au médecin du travail.
Attention
L'employeur ne doit pas passer outre les difficultés que soulève l'avis du médecin du travail et en modifier le sens. Il peut soit demander par écrit des précisions au médecin du travail, soit contester cet avis devant le conseil de prud'hommes via la procédure accélérée (voir question dédiée).
Exemple
L'employeur ne peut pas ajouter des restrictions à celles émises par le médecin du travail Cass. soc., 20 janv. 2010, no 08-44.322. Il ne peut pas non plus considérer qu'un avis d'aptitude avec réserves du médecin du travail Un tel avis n'existe aujourd'hui que pour les salariés en suivi médical renforcé, donc ceux affectés à un poste présentant des risques particuliers équivaut à un avis d'inaptitude Cass. soc., 13 avr. 2016, no 15-10.400. Tel est le cas lorsqu'un médecin du travail assortit un avis d'aptitude Un tel avis n'existe aujourd'hui que pour les salariés en suivi médical renforcé, donc ceux affectés à un poste présentant des risques particuliers de l'impossibilité pour le salarié de soulever des charges de plus de 10 kg. L'employeur ne doit pas le licencier en considérant qu'il ne peut aménager le poste en ce sens. Il doit demander au médecin du travail de se prononcer sur la capacité du salarié à exercer d'autres activités dans l'entreprise Cass. soc., 24 avr. 2001, no 97-44.104.
Que faire en l'absence de prescription de la part du médecin du travail ?
L'employeur doit solliciter, par écrit, le médecin du travail afin qu'il donne des indications sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise Cass. soc., 13 juill. 2004, no 02-42.134.
Attention
C'est le médecin du travail qui doit être sollicité. La consultation d'un médecin autre que le médecin du travail est inopérante Cass. soc., 28 juin 2006, no 04-47.672.
L'employeur peut-il limiter ses recherches en fonction des restrictions émises par le salarié ?
Oui, l'employeur peut limiter le périmètre de ses recherches, en tenant compte de la position exprimée par le salarié en réponse à une première offre de reclassement Cass. soc., 23 nov. 2016, no 14-26.398Cass. soc., 23 nov. 2016, no 15-18.092.
Exemple
Un salarié déclaré inapte refuse expressément d'être reclassé sur plusieurs postes situés en France, au motif qu'ils sont éloignés de son domicile. L'employeur ne lui propose alors aucun poste dans des sociétés du groupe situées à l'étranger (alors qu'à ce moment-là, le Code du travail imposait de proposer les postes du groupe à l'étranger, ce qui n'est plus le cas). Les juges ont considéré que l'employeur avait respecté son obligation de reclassement Cass. soc., 23 nov. 2016, no 14-26.398Cass. soc., 8 févr. 2017, no 15-22.964.
Attention
La Cour de cassation ne s'est pas prononcée sur la possibilité pour l'employeur d'interroger le salarié sur ses éventuelles restrictions quant à son reclassement, avant même de débuter ses recherches de reclassement. Elle n'a rendu de décision que dans des affaires où les salariés avaient formulé des restrictions géographiques en réponse à une première offre de reclassement. L'employeur doit donc être prudent sur ce point et proposer au salarié un premier poste de reclassement avant de limiter ses recherches en fonction des restrictions exprimées par le salarié.
Remarque
Les restrictions n'ont pas à être formulées de manière explicite par le salarié Cass. soc., 23 nov. 2016, no 15-18.092. Il est néanmoins recommandé, pour des raisons évidentes de preuve, de demander au salarié de formuler ses restrictions par écrit.
L'employeur doit-il muter d'autres salariés pour pouvoir proposer un poste de reclassement au salarié inapte ?
Non. L'employeur n'a aucune obligation de muter un salarié ou de créer un poste supplémentaire pour y reclasser le salarié inapte Cass. soc., 21 mars 2012, no 10-30.895.
S'il choisit tout de même de muter un salarié sur un autre poste pour permettre le reclassement du salarié inapte, il ne doit pas imposer la mutation : il s'agit d'une modification du contrat de travail Cass. soc., 8 févr. 2017, no 15-22.992. Il peut simplement la lui proposer Cass. soc., 14 déc. 2005, no 04-40.021.
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Procédure de licenciement pour inaptitude
Le fait de procéder à un recrutement extérieur sur un poste compatible avec les préconisations médicales est une violation de l'obligation de recherche de reclassement (Cass. soc., 30 avr. 2014, no 13-11.325).
Il doit s'agir d'une recherche effective : l'employeur ne peut se contenter de se prévaloir du fait que le registre du personnel ne fait pas mention des postes préconisés par le médecin du travail (Cass. soc., 7 juill. 2016, no 14-18.877).
L'employeur doit effectuer ses recherches de reclassement en fonction des indications du médecin du travail (C. trav., art. L. 4624-6Cass. soc., 15 janv. 2014, no 11-28.898). En cas de contentieux, il doit démontrer, soit qu'il a tenu compte des recommandations ou propositions du médecin du travail, soit qu'il était impossible de les suivre (Cass. soc., 14 oct. 2009, no 08-42.878). Sinon les juges considèrent qu'il n'a pas respecté son obligation de reclassement.
Seul le médecin du travail est compétent : l'employeur ne peut pas s'adresser à un autre médecin pour obtenir des propositions en vue du reclassement du salarié (Cass. soc., 28 juin 2006, no 04-47.672).
L'employeur ne doit pas passer outre les difficultés que soulève l'avis du médecin du travail et en modifier le sens. Il peut soit demander par écrit des précisions au médecin du travail, soit contester cet avis devant le conseil de prud'hommes via la procédure accélérée (voir question dédiée).
C'est le médecin du travail qui doit être sollicité. La consultation d'un médecin autre que le médecin du travail est inopérante (Cass. soc., 28 juin 2006, no 04-47.672).
La Cour de cassation ne s'est pas prononcée sur la possibilité pour l'employeur d'interroger le salarié sur ses éventuelles restrictions quant à son reclassement, avant même de débuter ses recherches de reclassement. Elle n'a rendu de décision que dans des affaires où les salariés avaient formulé des restrictions géographiques en réponse à une première offre de reclassement. L'employeur doit donc être prudent sur ce point et proposer au salarié un premier poste de reclassement avant de limiter ses recherches en fonction des restrictions exprimées par le salarié.
L'employeur peut également solliciter l'aide d'organismes extérieurs tels l'Anact ou la Carsat pour effectuer ses recherches de reclassement.
Codes, lois et réglementation
Code du travail, Article L. 1226-2
Code du travail, Article L. 1226-10
Code du travail, Article L. 4624-3
Code du travail, Article L. 4624-4
Code du travail, Article L. 4624-5
Code du travail, Article L. 4624-6
Jurisprudence
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 4300 du 28 octobre 1998, Pourvoi nº 96-44.395
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1661 du 24 avril 2001, Pourvoi nº 97-44.104
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2744 du 14 décembre 2005, Pourvoi nº 04-40.021
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1721 du 28 juin 2006, Pourvoi nº 04-47.672
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 795 du 26 avril 2007, Pourvoi nº 06-41.541
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1612 du 13 juillet 2004, Pourvoi nº 02-42.134
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 45 du 6 janvier 2010, Pourvoi nº 08-44.177
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 164 du 20 janvier 2010, Pourvoi nº 08-44.322
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1987 du 14 octobre 2009, Pourvoi nº 08-42.878
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 683 du 7 mars 2012, Pourvoi nº 11-11.311
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 838 du 21 mars 2012, Pourvoi nº 10-30.895
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2035 du 26 septembre 2012, Pourvoi nº 11-14.742
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 50 du 15 janvier 2014, Pourvoi nº 11-28.898
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Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 798 du 30 avril 2014, Pourvoi nº 13-11.325
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 802 du 13 avril 2016, Pourvoi nº 15-10.400
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1174 du 14 juin 2016, Pourvoi nº 14-17.032
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1394 du 7 juillet 2016, Pourvoi nº 14-18.877
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Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 310 du 8 février 2017, Pourvoi nº 15-22.964
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 311 du 8 février 2017, Pourvoi nº 15-22.992
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 802 du 11 mai 2017, Pourvoi nº 16-12.191
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1171 du 4 septembre 2019, Pourvoi nº 18-18.169
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 301 du 29 mars 2023, Pourvoi nº 21-15.472