Forfait en jours
Mise à jour : 11 avril 2023La mise en place d'un forfait en jours avec un salarié doit être précédée du recueil de l'accord du salarié par écrit via une convention individuelle de forfait C. trav., art. L. 3121-55. Celle-ci peut prendre la forme d'une clause dans le contrat de travail, ou bien d'un avenant.
Mais attention, tous les salariés ne peuvent pas conclure une convention de forfait. Il faut pour cela qu'ils disposent d'une autonomie dans la fixation de leurs horaires de travail et dans le mode d'organisation de leur travail.
Tous les salariés peuvent-ils conclure une convention de forfait en jours ?
Non. Seuls peuvent conclure une convention individuelle de forfait en jours sur l'année :
- les cadres qui disposent d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auquel ils sont intégrés
- les salariés dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées C. trav., art. L. 3121-58.
L'« autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps » dont le salarié, cadre ou non-cadre, doit bénéficier pour pouvoir conclure une convention de forfait en jours induit :
- une liberté de ne pas suivre l'horaire collectif applicable dans l'entreprise
- ainsi qu'une difficulté à mesurer précisément le temps de travail.
Les salariés éligibles sont donc ceux qui disposent d'une autonomie à la fois dans la fixation de leurs horaires de travail et dans le mode d'organisation de leur travail Cass. soc., 21 nov. 2012, nº 11-10.829. Ni la taille de l'entreprise, ni la présence d'autres salariés ne sont des éléments permettant de considérer que le critère d'autonomie est rempli Cass. soc., 25 janv. 2023, no 21-16.825.
Attention
Ces dispositions sont des règles d'ordre public : aucun accord collectif ne peut ouvrir les forfaits en jours à d'autres salariés, moins autonomes. En revanche, un accord collectif peut restreindre les catégories de salariés autorisées à recourir aux forfaits en jours.
Remarque
Le forfait en jours n'instaure pas pour autant au profit du salarié un droit à la libre fixation de ses horaires de travail indépendamment de toute contrainte liée à l'organisation du travail. Ainsi, la fixation de demi-journées ou de journées de présence imposées par l'employeur en fonction des contraintes liées l'activité de l'entreprise n'est pas incompatible avec l'existence d'une convention de forfait en jours dès lors que le salarié n'est pas empêché, en dehors de ces contraintes, d'organiser sa journée de travail librement Cass. soc., 2 févr. 2022, no 20-15.744.
Exemple
N'est pas autonome :
- le salarié dont l'emploi du temps est déterminé par la direction et son supérieur hiérarchique, et qui ne dispose pas du libre choix de ses repos hebdomadaires Cass. soc., 31 oct. 2007, nº 06-43.876
- celui soumis à un planning contraignant imposant une présence au sein de l'entreprise à des horaires prédéterminés, situation « antinomique avec la notion de cadre autonome » Cass. soc., 15 déc. 2016, nº 15-17.568
- le régisseur son dont la durée du travail est prédéterminée, ses fonctions s'appliquant à des événements dont les modalités sont connues au préalable, et qui doit respecter des plannings précis comportant notamment les jours et tranches horaires dans lesquelles doit être effectuée chacune des opérations afin que l'événement se déroule bien et laisse place au suivant Cass. soc., 27 mars 2019, nº 17-31.715.
La conclusion d'une convention de forfait jours exclue la qualification de cadre dirigeant Cass. soc., 12 janv. 2022, no 19-25.080.
Peut-on prévoir une période d'essai ou une période probatoire lorsque le salarié passe au forfait en jours ?
Si la signature de la convention de forfait intervient après l'embauche du salarié, la convention ne peut pas prévoir une nouvelle période d'essai mais seulement une période de probation ou période probatoire.
Pendant cette période, l'employeur ne peut pas rompre librement le contrat de travail. Il peut seulement mettre fin à la période probatoire et replacer le salarié dans ses fonctions antérieures.
Si le contrat de travail prévoit l'existence d'une période d'essai, celle-ci est nulle et la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse Cass. soc., 30 mars 2005, nº 03-41.797.
Un salarié en CDD peut-il être soumis à un forfait en jours ?
Oui. Rien n'empêche un salarié recruté par un contrat à durée déterminée de conclure une convention de forfait en jours si toutes les conditions de recours à ce forfait sont réunies.
Exemple
Un salarié recruté pour remplacer un salarié absent soumis à une convention de forfait en jours peut, lui aussi, conclure une telle convention.
Quelle forme doit revêtir la convention individuelle de forfait ?
La convention individuelle de forfait doit nécessairement être écrite C. trav., art. L. 3121-55. Lorsque le recours au forfait est décidé :
- dès la conclusion du contrat de travail, l'écrit peut par exemple prendre la forme d'une clause spécifique relative à la durée du travail dans le contrat de travail
- après, la convention individuelle de forfait prend la forme d'un avenant au contrat de travail.
Remarque
Le forfait en jours ne peut pas être considéré comme un simple changement des conditions de travail du salarié que l'employeur pourrait lui imposer. Il s'agit nécessairement d'une modification de son contrat de travail. Le forfait en jours prévoit en effet des modalités particulières d'aménagement de la durée et du temps de travail et déroge au droit commun de la rémunération.
En cas de litige, les juges vérifient que le salarié a bien donné son consentement au forfait en jours. L'écrit doit être non-équivoque.
Exemple
N'est pas considéré comme l'écrit requis :
- la seule fixation d'une rémunération forfaitaire sans que soit envisagé expressément le recours à la convention de forfait Cass. soc., 26 mars 2008, nº 06-45.990
- le seul renvoi dans le contrat de travail à l'accord d'aménagement du temps de travail prévoyant le recours au forfait en jours Cass. soc., 31 janv. 2012, nº 10-17.593
- la remise au salarié, lors de la conclusion du contrat de travail, de l'accord collectif organisant le recours au forfait en jours Cass. soc., 19 juin 2019, nº 17-31.523
- des mentions sur le bulletin de salaire qui permettraient de démontrer la réalité de la convention de forfait en jours Cass. soc., 4 nov. 2015, nº 14-10.419.
Quelle est la durée annuelle de travail d'un salarié soumis à une convention de forfait en jours ?
Le nombre de jours de travail maximal que doit réaliser le salarié est fixé par l'accord collectif applicable. Une limite est cependant fixée à 218 jours par an C. trav., art. L. 3121-64.
Remarque
Les stipulations de l'accord collectif d'entreprise prévalent, le cas échéant, sur celles de la convention ou de l'accord collectif de branche (voir question dédiée). Par conséquent, si un accord de branche prévoit un forfait en jours d'une durée de 200 jours, une entreprise de cette branche peut, par un accord collectif d'entreprise, organiser le recours à un forfait en jours d'une durée de 218 jours.
La référence fixée par l'accord collectif est un maximum applicable dans la branche ou l'entreprise concernée. L'employeur et le salarié peuvent conclure une convention individuelle de forfait prévoyant une durée inférieure Cass. soc., 27 mars 2019, nº 16-23.800 ; Cass. soc., 9 juill. 2003, nº 01-42.451.
Est-il possible de recourir à un forfait en jours à temps partiel ?
Oui, rien ne s'oppose à prévoir dans le forfait un nombre de jours réduits. En revanche, le salarié n'est pas considéré comme un salarié à temps partiel Cass. soc., 27 mars 2016, nº 16-23.800.
Ainsi, même si le salarié travaille un petit nombre de jours dans l'année, il est considéré à temps plein, ce qui emporte les conséquences suivantes :
- le salarié est compté comme un temps plein dans les effectifs de l'entreprise C. trav., art. L. 1111-2
- en matière de sécurité sociale :
- l'entreprise ne peut pas bénéficier de l'abattement d'assiette applicable aux salariés à temps partiel CSS, art. L. 242-8Cass. 2e civ., 1er déc. 2011, nº 10-19.710
- le salarié ne peut pas bénéficier d'un régime de retraite progressive spécifique au temps partiel Cass. 2e civ., 3 nov. 2016, nº 15-26.276.
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Le forfait en jours dans l'entreprise
Ces dispositions sont des règles d'ordre public : aucun accord collectif ne peut ouvrir les forfaits en jours à d'autres salariés, moins autonomes. En revanche, un accord collectif peut restreindre les catégories de salariés autorisées à recourir aux forfaits en jours.
Codes, lois et réglementation
Code de la sécurité sociale, Article L. 242-8
Code du travail, Article L. 1111-2
Code du travail, Article L. 3121-55
Code du travail, Article L. 3121-58
Code du travail, Article L. 3121-64
Jurisprudence
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1946 du 9 juillet 2003, Pourvoi nº 01-42.451
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 759 du 30 mars 2005, Pourvoi nº 03-41.797
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2285 du 31 octobre 2007, Pourvoi nº 06-43.876
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 649 du 26 mars 2008, Pourvoi nº 06-45.990
Cour de cassation, Deuxième Chambre civile, Arrêt nº 1910 du 1 décembre 2011, Pourvoi nº 10-19.710
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 275 du 31 janvier 2012, Pourvoi nº 10-17.593
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2412 du 21 novembre 2012, Pourvoi nº 11-10.829
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1833 du 4 novembre 2015, Pourvoi nº 14-10.419
Cour de cassation, Deuxième Chambre civile, Arrêt nº 1572 du 3 novembre 2016, Pourvoi nº 15-26.276
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2231 du 15 décembre 2016, Pourvoi nº 15-17.568
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 516 du 27 mars 2019, Pourvoi nº 17-31.715
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 532 du 27 mars 2019, Pourvoi nº 16-23.800
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1021 du 19 juin 2019, Pourvoi nº 17-31.523
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 55 du 12 janvier 2022, Pourvoi nº 19-25.080
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 136 du 2 février 2022, Pourvoi nº 20-15.744
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 45 du 25 janvier 2023, Pourvoi nº 21-16.825