Rétrogradation et mutation
Mise à jour : 02 mai 2022Le salarié est en droit de refuser toute sanction qui modifie son contrat de travail Cass. soc., 16 juin 1998, no 95-45.033. Face à ce refus, l'employeur peut décider de renoncer à toute sanction, de lui imposer une autre sanction ou de licencier le salarié si les conditions le permettent.
Le salarié peut-il refuser une rétrogradation ?
Oui, car la rétrogradation est une sanction qui entraîne une modification du contrat de travail du salarié notamment une diminution de sa rémunération. Elle ne peut pas être imposée au salarié et nécessite donc son accord pour être mise en place Cass. soc., 17 juin 2009, no 07-44.570.
Le salarié peut-il refuser une mutation disciplinaire ?
En principe, l'employeur ne peut pas imposer une sanction qui modifie le contrat de travail. Le salarié est donc en droit de la refuser Cass. soc., 16 juin 1998, no 95-45.033.
Le salarié peut refuser la mutation disciplinaire lorsqu'elle modifie son contrat de travail, c'est-à-dire lorsque les conditions suivantes sont réunies :
- un lieu de travail exclusif est mentionné de manière claire et précise dans son contrat de travail Cass. soc., 26 oct. 2011, nº 09-71.322
- le contrat de travail ne comporte pas de clause de mobilité
- le lieu d'affectation du salarié n'est pas situé dans le même secteur géographique (voir §) Cass. soc., 17 juin 2009, no 07-44.570.
Le salarié ne peut pas refuser la mutation disciplinaire lorsqu'elle ne modifie pas son contrat de travail c'est-à-dire si :
- le contrat ne fixe pas précisément le lieu de travail
- ou en présence d'une clause de mobilité
- ou si le lieu d'affectation se situe dans le même secteur géographique.
Il convient également de vérifier qu'un accord collectif Accord d'entreprise, d'établissement ou de branche. L'accord d'entreprise ou d'établissement prime sur celui de la branche. ne requiert pas l'acceptation du salarié.
De quel délai dispose le salarié pour exprimer son refus ?
C'est l'employeur qui doit fixer le délai dont dispose le salarié pour refuser la proposition de modification du contrat de travail à titre de sanction.
Astuce
Pour fixer le délai :
- l'employeur doit prendre en compte que si le salarié refuse la sanction, et qu'il souhaite prononcer une autre sanction (hors licenciement), il disposera de peu de temps : un mois suivant la tenue de l'entretien préalable initial (à moins que l'employeur décide d'organiser un nouvel entretien préalable)
- il semblerait que le délai imparti au salarié pour répondre doive être de maximum deux mois à compter de la notification de la sanction Cass. soc., 27 mai 2021, nº 19-17.587 (voir §)
- pour plus de clarté, il est conseillé de préciser que l'absence de réponse du salarié vaut refus de la sanction disciplinaire.
Attention
Lorsque l'employeur indique qu'à l'issue du délai de réflexion l'absence de réponse du salarié vaut refus, la fin du délai imparti vaut refus implicite du salarié et fixe le début des deux mois dont l'employeur dispose pour convoquer le salarié à un entretien préalable en vue d'un licenciement. Peu importe que le salarié ait répondu postérieurement Cass. soc., 27 mai 2021, nº19-17.587.
Quelles sont les modalités par lesquelles le salarié exprime son refus ?
Il est possible de demander au salarié un écrit signé par lequel il exprime son refus de la mesure. Cette demande peut être formulée directement dans la lettre de proposition. À défaut de réponse, il appartient à l'employeur d'inviter le salarié à prendre parti dans un délai raisonnable Cass. soc., 1er avr. 2003, nº 01-40.389.
Quelle procédure suivre si une sanction autre qu'une mutation, une rétrogradation ou un licenciement est envisagé ?
Si l'employeur remplace la première sanction par une sanction disciplinaire autre qu'un licenciement, il n'est pas tenu de convoquer le salarié à un second entretien préalable (Cass. soc., 25 mars 2020, no 18-11.433). Dans ce cas, la sanction doit être notifiée dans un délai compris entre deux jours ouvrables et un mois après l'entretien préalable initial C. trav., art. L. 1332-2 (voir §).
En revanche, si l'employeur décide volontairement de convoquer le salarié à un second entretien préalable en vue d'une sanction disciplinaire, par exemple, s'il n'a pas arrêté son avis sur la sanction à prendre, il doit en respecter la procédure. Il doit notamment convoquer le salarié dans les deux mois suivant la date à laquelle le salarié a exprimé son refus Cass. soc., 27 mai 2021, nº19-17.587 (voir § et §).
Que peut faire l'employeur si le salarié refuse la sanction qui modifie son contrat de travail ?
La sanction ne peut pas être imposée au salarié. Si le salarié la refuse, l'employeur pourra :
- prononcer une autre sanction, qui peut être plus légère, en lieu et place de la rétrogradation ou de la mutation Cass. soc., 16 juin 1998, no 95-45.033.
- prononcer un licenciement, y compris un licenciement pour faute grave Cass. soc., 11 févr. 2009, no 06-45.897 ou pour insuffisance professionnelle Cass. soc., 9 mars 2022, 20-17.005. Le licenciement est alors fondé sur la même faute que celle qui avait justifié la mutation ou la rétrogradation. Il ne peut en aucun cas être justifié par le refus de la mutation ou de la rétrogradation Cass. soc., 13 oct. 1999, no 97-42.072.
- renoncer à toute sanction et rétablir le salarié dans son ancien emploi ou sur son ancien lieu de travail.
Quelle procédure suivre si un licenciement est envisagé ?
Si l'employeur envisage de substituer la rétrogradation ou la mutation disciplinaire par un licenciement, il est tenu de :
- convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable dans les deux mois à compter du refus exprimé par le salarié Cass. soc., 28 avril 2011, nº10-13.979 (voir § et §). Si l'absence de réponse du salarié dans le délai imparti vaut refus implicite, le délai de deux mois commence à son issue Cass. soc., 27 mai 2021, nº19-17.587. La convocation doit avoir lieu au plus vite s'il envisage un licenciement pour faute grave Cass. soc. 7 juillet 2004 nº 02-44.476 (voir §)
- notifier le licenciement dans un délai compris entre deux jours ouvrables et un mois après l'entretien préalable au salarié.
Pour plus de précisions sur les délais et leurs modes de calcul, voir tableau.
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Les délais de procédure de la rétrogradation et de la mutation
Étape de la procédure | Délais | Mode de calcul |
Entre la connaissance de la faute et la convocation au premier entretien préalable | Maximum deux mois à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de la faute | De quantième en quantième Désignation du jour du mois par son chiffre, par exemple, le 16 août Expire le dernier jour à minuit Si le dernier jour est un dimanche ou un jour férié ou chômé, le terme est prolongé jusqu'au premier jour ouvrable suivant |
Entre la convocation et le premier entretien préalable | Délai non précisé dans la loi Minimum cinq jours après la présentation de la lettre de convocation comme en matière de licenciement | Non précisé dans la loi Possible d'appliquer le même mode de calcul qu'en matière de licenciement pour motif personnel : décompte en jours ouvrables qui ne peut expirer un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé |
Entre le premier entretien préalable et la notification de la proposition de rétrogradation ou de mutation disciplinaire | Minimum deux jours ouvrables à compter de l'entretien préalable Maximum un mois après l'entretien préalable | De quantième en quantième Désignation du jour du mois par son chiffre, par exemple, le 16 août Expire le dernier jour à minuit Si le dernier jour est un dimanche ou un jour férié ou chômé, le terme est prolongé jusqu'au premier jour ouvrable suivant |
Entre la notification de la proposition et le refus ou l'accord du salarié | Délai non précisé dans la loi Délai fixé par l'employeur. Il semble que le délai soit de maximum de deux mois à compter de la notification de la sanction
| Non précisé dans la loi Possible d'appliquer mode de calcul utilisé entre la connaissance de la faute et la convocation à l'entretien préalable : De quantième en quantième Désignation du jour du mois par son chiffre, par exemple, le 16 août Expire le dernier jour à minuit Le dernier jour ne peut pas être un dimanche, un jour férié ou chômé |
Suite à la proposition de la sanction le salarié peut décider :
| ||
Si le salarié accepte la sanction | ||
Entre l'acceptation de la sanction et l'exécution de la sanction | Délai non précisé par la loi L'employeur peut décider de la date d'exécution de la sanction tout en respectant un délai raisonnable
| Non précisé dans la loi Possible d'appliquer mode de calcul utilisé entre la connaissance de la faute et la convocation à l'entretien préalable : De quantième en quantième Désignation du jour du mois par son chiffre, par exemple, le 16 août Expire le dernier jour à minuit Le dernier jour ne peut pas être un dimanche, un jour férié ou chômé |
Si le salarié refuse la sanction, l'employeur peut décider de :
| ||
En cas de refus, si l'employeur décide de licencier le salarié | ||
Entre le refus du salarié et la convocation au nouvel entretien préalable |
Maximum deux mois à compter du refus du salarié | De quantième en quantième Désignation du jour du mois par son chiffre, par exemple, le 16 août Expire le dernier jour à minuit Si le dernier jour est un dimanche ou un jour férié ou chômé, le terme est prolongé jusqu'au premier jour ouvrable suivant |
Entre la convocation à l'entretien préalable et l'entretien préalable | Délai non précisé par la loi Minimum cinq jours après la présentation de la lettre de convocation au deuxième entretien préalable comme en matière de licenciement | Non précisé dans la loi Décompte en jours ouvrables qui ne peut expirer un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé |
Entre l'entretien préalable et la notification du licenciement |
Minimum deux jours ouvrables à compter de l'entretien préalable Maximum un mois après l'entretien préalable | Lorsque ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant |
En cas de refus, si l'employeur décide d'appliquer une autre sanction qu'un licenciement | ||
Entre le refus du salarié et la notification de la sanction autre qu'un licenciement |
Minimum deux jours ouvrables à compter de l'entretien préalable Maximum un mois après l'entretien préalable | De quantième en quantième Désignation du jour du mois par son chiffre, par exemple, le 16 août Expire le dernier jour à minuit Si le dernier jour est un dimanche ou un jour férié ou chômé, le terme est prolongé jusqu'au premier jour ouvrable suivant |
Remarque : Si l'employeur décide de licencier le salarié pour faute grave, il devra convoquer le salarié et mener l'ensemble de la procédure dans des délais restreints |
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Rétrogradation et mutation : la procédure
Lorsque l'employeur indique qu'à l'issue du délai de réflexion l'absence de réponse du salarié vaut refus, la fin du délai imparti vaut refus implicite du salarié et fixe le début des deux mois dont l'employeur dispose pour convoquer le salarié à un entretien préalable en vue d'un licenciement. Peu importe que le salarié ait répondu postérieurement (Cass. soc., 27 mai 2021, nº19-17.587).
Pour fixer le délai :
- l'employeur doit prendre en compte que si le salarié refuse la sanction, et qu'il souhaite prononcer une autre sanction (hors licenciement), il disposera de peu de temps : un mois suivant la tenue de l'entretien préalable initial (à moins que l'employeur décide d'organiser un nouvel entretien préalable)
- il semblerait que le délai imparti au salarié pour répondre doive être de maximum deux mois à compter de la notification de la sanction (Cass. soc., 27 mai 2021, nº 19-17.587) (voir §)
- pour plus de clarté, il est conseillé de préciser que l'absence de réponse du salarié vaut refus de la sanction disciplinaire.
Codes, lois et réglementation
Code du travail, Article L. 1332-2
Jurisprudence
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 3414 du 16 juin 1998, Pourvoi nº 95-45.033
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1575 du 7 juillet 2004, Pourvoi nº 02-44.476
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 268 du 11 février 2009, Pourvoi nº 06-45.897
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1288 du 17 juin 2009, Pourvoi nº 07-44.570
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1102 du 1 avril 2003, Pourvoi nº 01-40.389
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 3556 du 13 octobre 1999, Pourvoi nº 97-42.072
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 968 du 28 avril 2011, Pourvoi nº 10-13.979
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2155 du 26 octobre 2011, Pourvoi nº 09-71.322
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 623 du 27 mai 2021, Pourvoi nº 19-17.587
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 275 du 9 mars 2022, Pourvoi nº 20-17.005