Forfait en jours
Mise à jour : 11 avril 2023Les cadres au forfait en jours ne sont pas soumis aux durées maximales quotidiennes (10 heures) et hebdomadaires (48 heures) de travail. En revanche, la réglementation sur les temps de repos leur est bien applicable : ils doivent bénéficier d'un repos quotidien de 11 heures consécutives ainsi que d'un jour par semaine. De même, ils doivent bénéficier de pauses obligatoires de 20 minutes toutes les 6 heures.
Par définition, les salariés au forfait en jours ne peuvent pas effectuer d'heures supplémentaires, mais leur pendant en jours existe bien : l'employeur peut leur racheter des jours de repos afin qu'ils réalisent un nombre de jours de travail supérieur au nombre de jours défini dans la convention de forfait.
La durée du travail du salarié au forfait en jours est-elle limitée ?
Oui. Si les salariés au forfait en jours ne sont pas soumis aux durées maximales de travail, en revanche, les repos quotidiens et hebdomadaires s'appliquent bien à eux.
Ainsi, comme tout salarié, un salarié au forfaits en jours doit bénéficier :
- d'un repos quotidien d'une durée minimale de 11 heures consécutives C. trav., art. L. 3131-1. Son amplitude de travail ne doit donc pas dépasser 13 heures Cass. soc., 18 déc. 2001, nº 99-43.351
- une fois par semaine, d'une période de repos de 24 heures consécutives, auxquelles s'ajoutent les 11 heures de repos quotidien C. trav., art. L. 3132-1. Il est interdit de faire travailler un salarié plus de six jours par semaine.
Exemple
Un salarié au forfait en jours qui commence à réaliser une tâche professionnelle à 7h00 le matin doit avoir terminé sa journée de travail au plus tard à 20h00, quel que soit le nombre d'heures effectivement travaillées dans cet intervalle.
Un salarié qui cesse le travail le samedi à 20h00 ne peut pas recommencer à travailler avant le lundi à 7h00.
Remarque
Il est interdit de faire travailler un salarié plus de six jours par semaine mais pas de travailler plus de six jours consécutifs. La période minimale de repos hebdomadaire ne doit en effet pas nécessairement être accordée à la fin d'une période de travail de six jours consécutifs : elle doit être accordée une fois dans chaque période de travail de sept jours CJUE 9 nov. 2017, C-306/16. Si la période de référence est la semaine civile, un salarié peut donc travailler le lundi, bénéficier d'un repos le mardi, puis travailler neuf jours consécutifs avant de bénéficier d'un repos le vendredi suivant. Dans cet exemple, le salarié aura bien bénéficié d'un jour complet de repos durant chaque semaine de travail.
En revanche, les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours ne sont pas soumis C. trav., art. L. 3121-62 :
- à la durée quotidienne maximale de travail effectif fixée à dix heures C. trav., art. L. 3121-18
- à la durée hebdomadaire maximale de travail fixée à 48 heures, ou à 44 heures en moyenne sur 12 semaines consécutives C. trav., art. L. 3121-20C. trav., art. L. 3121-22
- à la durée légale hebdomadaire fixée à 35 heures C. trav., art. L. 3121-27. Par extension, ils ne sont donc pas concernés par les dispositions légales relatives aux heures supplémentaires.
Le salarié peut-il travailler plus que le nombre de jours prévu dans la convention ?
Oui. Ces journées de travail supplémentaires peuvent être le résultat d'un rachat de jours de repos par l'employeur, ou de l'affectation de ces jours par le salarié à un compte épargne-temps ou à un plan d'épargne pour la retraite :
1. Rachat des jours de repos : le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son salaire :
- un avenant à la convention de forfait doit être établi. Il est conclu pour l'année en cours seulement et ne peut être reconduit tacitement. Il prévoit le taux de la majoration applicable à la rémunération de ce temps de travail supplémentaire
- le taux de la majoration est au minimum de 10 % C. trav., art. L. 3121-59
- un accord collectif peut fixer le nombre maximal de jours travaillés dans l'année lorsque le salarié renonce à une partie de ses jours de repos (voir question dédiée) C. trav., art. L. 3121-64. En l'absence de précisions conventionnelles, le nombre maximal de jours travaillés dans l'année est de 235 (ce qui correspond à un salarié travaillant 5 jours ouvrés par semaine). Il bénéficie de deux jours de repos par semaine, soit 104 jours de repos hebdomadaire, de 25 jours ouvrés de congés payés et du 1er mai chômé. S'il renonce à l'ensemble de ses jours de repos, il travaillera 235 jours (365-104-25-1) C. trav., art. L. 3121-66.
Remarque
En l'absence d'accord écrit sur le rachat des jours de repos, le juge prud'homal détermine le montant de la majoration applicable. Il peut fixer un taux supérieur au taux minimum de 10 % prévu par le Code du travail Cass. soc., 26 janv. 2022, no 20-13.266.
Attention
Le salarié doit bénéficier d'au moins un jour de repos par semaine, soit 52 jours de repos hebdomadaire sur l'année. Il bénéficie également de 30 jours ouvrables de congés payés. Enfin, parmi les jours fériés, seul le 1er mai est obligatoirement chômé. Par conséquent, si les partenaires sociaux veulent prévoir le nombre maximal de jours travaillés le plus élevé possible, un salarié au forfait en jours qui renonce à l'ensemble de ses repos pourra travailler jusqu'à 282 jours (365-52-30-1).
2. Compte épargne-temps : il permet au salarié d'accumuler des droits à congés rémunérés ou de bénéficier d'une rémunération, immédiate ou différée, en contrepartie des périodes de congés ou de repos non pris, ou des sommes qu'il y a affectées :
- le salarié ne peut toutefois affecter à son compte épargne-temps :
- ni les 4 premières semaines obligatoires de congés payés C. trav., art. L. 3151-2
- ni son repos hebdomadaire, puisqu'il ne peut pas travailler plus de 6 jours par semaine C. trav., art. L. 3132-1.
- le compte épargne-temps peut être mis en place par un accord collectif Un accord d'entreprise, d'établissement ou de branche. L'accord d'entreprise ou d'établissement prime sur la branche. qui doit déterminer dans quelles conditions et limites le compte peut être alimenté en temps ou en argent C. trav., art. L. 3152-1. L'accord peut ainsi prévoit la possibilité pour le salarié d'affecter à ce compte les jours de repos dont il bénéficie en application d'une convention de forfait en jours, sous réserve de respecter une double limite :
- le nombre maximal de jours travaillés déterminé par l'accord collectif sur les forfaits en jours ou fixé à 235 jours en l'absence d'accord
- le nombre maximal de jours de repos pouvant être affectés chaque année par le salarié à un compte épargne-temps.
Exemple
Un accord collectif organisant le recours au forfait jours prévoit que la durée de ce forfait est de 218 jours. Ce même accord prévoit que, sous réserve de ne pas travailler plus de 230 jours par an, le salarié peut renoncer à des jours de repos en échange d'une majoration de salaire de 20 %.
Un autre accord collectif met en place un compte épargne-temps dans l'entreprise et prévoit que le salarié, y compris en forfait jours, peut y affecter jusqu'à 20 jours de repos.
Le salarié au forfait en jours peut donc affecter jusqu'à 12 jours de repos à son compte épargne-temps. Il ne pourra pas aller jusqu'au maximum de 20 jours fixé par le second accord collectif, car cela l'amènerait à travailler plus que les 230 jours prévus par le premier.
3. Plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) : le Perco a pour objet la constitution d'une épargne en vue de la retraite, laquelle donnera lieu à une rente :
- les droits inscrits au compte épargne-temps peuvent être versés sur le plan d'épargne pour la retraite collectif. En l'absence de compte épargne-temps dans l'entreprise, le salarié peut, dans la limite de 10 jours par an, verser les sommes correspondant à des jours de repos non pris sur le Perco C. trav., art. L. 3334-8
- le Perco peut être mis en place à l'initiative de l'entreprise ou au moyen d'un accord collectif C. trav., art. L. 3334-2.
Exemple
Un accord collectif organisant le recours au forfait jours prévoit que la durée de ce forfait est de 218 jours et au maximum de 230 jours par an dans le cadre de renoncement à des jours de repos. Par une décision unilatérale, un employeur met en place un plan d'épargne pour la retraite collectif au sein de l'entreprise, dans laquelle il n'existe pas de compte épargne-temps. Le salarié au forfait en jours pourra affecter jusqu'à 10 jours de repos à ce plan d'épargne. Il ne pourrait pas aller jusqu'au maximum de 12 jours en application de l'accord collectif sur les forfaits jours, car il n'y a pas de compte épargne-temps dans l'entreprise.
Remarque
Si le salarié travaille pendant des jours censés être consacrés au repos en dehors de ces dispositifs, la situation doit être envisagée sous l'angle de la régulation de la charge de travail (voir question dédiée).
Comment sont rémunérés les « jours supplémentaires » réalisés par le salarié ?
La renonciation du salarié à des jours de repos (voir question dédiée) se fait en contrepartie d'une majoration du salaire, dont le taux est fixé par l'accord collectif et qui doit être au minimum égal à 10 % C. trav., art. L. 3121-59.
Exemple
Un salarié bénéficie d'un forfait de 218 jours pour 43 426,29 € annuel. Sa journée de travail est rémunérée à hauteur de 199,20 € (43 426,29 € / 218 jours). L'accord collectif peut prévoir la possibilité pour le salarié de renoncer à 10 jours de repos moyennant une majoration de salaire de 20 %. Si le salarié renonce à un jour de repos en application de cet accord, il perçoit donc une rémunération supplémentaire égale à 239,04 € (199,20 € × 1,2).
Un salarié au forfait en jours peut-il travailler le dimanche ?
Il n'existe pas de dispositions sur le travail le dimanche spécifiques aux salariés au forfait en jours. Ils sont donc soumis aux mêmes règles que les autres salariés. Ainsi, le repos hebdomadaire doit en principe être donné le dimanche C. trav., art. L. 3132-3.
Remarque
Si, dans l'entreprise, les salariés qui travaillent le dimanche ont droit à des contreparties, le salarié au forfait en jours doit en bénéficier, notamment en matière de rémunération. Les majorations de rémunération s'appliquent sur la journée de travail – ou une demi-journée, le cas échéant –, peu important le nombre d'heures effectivement travaillées sur la journée ou la demi-journée.
Le salarié au forfait en jours qui est amené à travailler le dimanche au mépris des règles relatives au repos dominical ne peut solliciter le paiement d'heures supplémentaires s'il ne conteste pas la validité de sa convention de forfait Cass. soc., 21 sept. 2022, no 21-14.106.
L'horaire collectif de travail s'applique-t-il aux salariés au forfait en jours ?
Non. Par définition, le salarié soumis au forfait en jours doit être autonome dans l'organisation de son emploi du temps. Une telle autonomie est, par définition, inconciliable avec des plages horaires fixes imposées au salarié Cass. soc., 15 déc. 2016, nº 15-17.568.
Le forfait en jours n'est cependant pas incompatible avec une obligation pour le salarié de se soumettre à certaines contraintes d'emploi du temps, comme l'obligation d'assister à des réunions, de participer à des groupes de travail, etc. Ces contraintes doivent cependant être ponctuelles et nécessaires au bon fonctionnement de l'équipe dans laquelle le salarié est intégré.
Le salarié doit-il bénéficier des pauses obligatoires ?
Oui. Le régime juridique du forfait en jours ne prévoit aucune règle spécifique. Comme les autres salariés, le salarié a droit à une pause de 20 minutes dès que le temps de travail quotidien atteint 6 heures C. trav., art. L. 3121-16.
Il doit s'agir d'une pause de 20 minutes consécutives : la prise d'une ou plusieurs pauses de durée inférieure ne réduit pas la durée de la pause à laquelle le salarié a droit lorsque sa durée du travail atteint 6 heures Cass. soc., 20 févr. 2013, nº 11-26.793.
Remarque
En pratique, des difficultés peuvent apparaître pour déterminer si le salarié a droit à cette pause et s'il en a effectivement bénéficié, puisque le salarié n'est pas soumis à un décompte horaire. En outre, l'autonomie du salarié lui permet en principe d'être libre de prendre cette pause ou non. L'employeur doit néanmoins prouver qu'il s'est acquitté de son obligation en la matière Cass. soc., 17 oct. 2012 nº 10-17.370. Dans le doute sur la durée effectivement travaillée par le salarié, il convient de prendre les mesures nécessaires pour qu'il puisse bénéficier d'au moins une pause par journée de travail.
Un salarié au forfait en jours peut-il être soumis à des astreintes ?
Oui. Ces salariés sont soumis aux dispositions légales relatives aux astreintes C. trav., art. L. 3121-9.
La durée d'une intervention durant une astreinte est considérée comme du temps de travail effectif C. trav., art. L. 3121-9. Pour un salarié au forfait en jours, cela signifie qu'une intervention, quelle que soit sa durée, entraînera automatiquement le décompte d'un jour ou d'une demi-journée de son forfait, selon les modalités de décomptes prévues par l'accord collectif.
Attention
Exception faite de la durée d'intervention, la période d'astreinte est prise en compte pour le calcul de la durée minimale de repos quotidien et des durées minimales de repos hebdomadaire C. trav., art. L. 3121-10.
Qu'il y ait ou non une intervention, le fait d'être soumis à une astreinte ouvre droit pour le salarié à une contrepartie soit sous forme financière, soit sous forme de repos C. trav., art. L. 3121-9 fixée par un accord collectif ou, en l'absence de stipulations conventionnelles, unilatéralement par l'employeur C. trav., art. L. 3121-11C. trav., art. L. 3121-12.
Remarque
L'absence d'incompatibilité de principe entre astreinte et forfait en jours n'exclut pas toutes les possibles difficultés :
- si une intervention lors de l'astreinte conduit un salarié à réaliser un jour de travail supplémentaire par rapport à ce qui est prévu dans le forfait, il convient en théorie d'appliquer le principe du « rachat » des jours de repos, ce qui peut être difficile à justifier si aucun avenant en ce sens n'a été conclu entre l'employeur et le salarié
- la soumission d'un salarié à une astreinte – en principe, ce dernier ne peut pas refuser d'effectuer des astreintes lorsqu'elles sont prévues par un accord collectif Cass. soc., 16 déc. 1998, nº 96-42.102 – peut être difficilement conciliable avec l'autonomie inhérente au forfait en jours. Une astreinte, avec une obligation de rester disponible et d'intervenir en cas de demande de l'employeur, doit donc rester exceptionnelle, lorsque des circonstances particulières l'exigent.
Ces deux régimes juridiques doivent donc être appliqués simultanément avec beaucoup de précautions.
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Le forfait en jours dans l'entreprise
Le salarié doit bénéficier d'au moins un jour de repos par semaine, soit 52 jours de repos hebdomadaire sur l'année. Il bénéficie également de 30 jours ouvrables de congés payés. Enfin, parmi les jours fériés, seul le 1er mai est obligatoirement chômé. Par conséquent, si les partenaires sociaux veulent prévoir le nombre maximal de jours travaillés le plus élevé possible, un salarié au forfait en jours qui renonce à l'ensemble de ses repos pourra travailler jusqu'à 282 jours (365-52-30-1).
Exception faite de la durée d'intervention, la période d'astreinte est prise en compte pour le calcul de la durée minimale de repos quotidien et des durées minimales de repos hebdomadaire C. trav., art. L. 3121-10.
Codes, lois et réglementation
Code du travail, Article L. 3132-1
Code du travail, Article L. 3132-3
Code du travail, Article L. 3334-8
Code du travail, Article L. 3334-2
Code du travail, Article L. 3121-9
Code du travail, Article L. 3121-10
Code du travail, Article L. 3121-11
Code du travail, Article L. 3121-12
Code du travail, Article L. 3121-16
Code du travail, Article L. 3121-18
Code du travail, Article L. 3121-20
Code du travail, Article L. 3121-22
Code du travail, Article L. 3121-27
Code du travail, Article L. 3121-59
Code du travail, Article L. 3121-62
Code du travail, Article L. 3121-64
Code du travail, Article L. 3121-66
Code du travail, Article L. 3131-1
Code du travail, Article L. 3151-2
Code du travail, Article L. 3152-1
Jurisprudence
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 5431 du 16 décembre 1998, Pourvoi nº 96-42.102
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 5307 du 18 décembre 2001, Pourvoi nº 99-43.351
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2185 du 17 octobre 2012, Pourvoi nº 10-17.370
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 371 du 20 février 2013, Pourvoi nº 11-26.793
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2231 du 15 décembre 2016, Pourvoi nº 15-17.568
Cour de justice de l'Union européenne, 2ème Chambre, Arrêt du 9 novembre 2017, Affaire nº C-306/16
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 123 du 26 janvier 2022, Pourvoi nº 20-13.266
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 983 du 21 septembre 2022, Pourvoi nº 21-14.106