Forfait en jours
Mise à jour : 11 avril 2023L'employeur est responsable du contrôle et de la régulation de la charge de travail du salarié, compte tenu de son obligation de sécurité. Il doit en priorité suivre les préconisations de l'accord collectif sur ce sujet. Mais lorsque l'accord collectif ne prévoit rien ou que les mesures conventionnelles sont insuffisantes, il doit les compléter en établissant un document de contrôle des jours travaillés, en s'assurant que la charge est compatible avec les temps de repos et en organisant des entretiens avec le salarié.
Relève également de la responsabilité de l'employeur, le droit à la déconnexion. Comme la régulation de la charge de travail, celui-ci permet d'assurer au salarié un repos quotidien et hebdomadaire. En l'absence d'accord collectif sur le sujet, l'employeur doit le définir et s'assurer de son effectivité.
Comment l'employeur doit-il assurer le suivi et la régulation de la charge de travail ?
L'employeur a l'obligation de s'assurer régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail C. trav., art. L. 3121-60Cass. soc., 19 déc. 2018, nº 17-18.725. Le suivi de la charge de travail du salarié au forfait jours relève de son obligation de sécurité Cass. soc., 2 mars 2022, nº 20-16.683.
Attention
Aucun accord collectif ne peut alléger cette obligation de contrôle et de régulation de la charge de travail C. trav., art. L. 3121-60
Si un accord collectif prévoit des mesures de suivi et de régulation de la charge de travail, l'employeur doit bien veiller à les mettre en œuvre conformément aux dispositions conventionnelles C. trav., art. L. 3121-64Cass. soc., 15 déc. 2016, nº 14-29.701 ; Cass. soc., 23 janv. 2019, nº 17-22.148. En l'absence d'accord, l'employeur doit prendre unilatéralement les mesures visant à assurer ce suivi et cette régulation.
Si l'accord collectif ne comporte aucune modalité relative au suivi et à la régulation de la charge de travail, l'employeur doit :
- établir un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées. Sous la responsabilité de l'employeur, ce document peut être renseigné par le salarié
- s'assurer que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires
- organiser une fois par an un entretien avec le salarié pour évoquer sa charge de travail, qui doit être raisonnable, l'organisation de son travail, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération C. trav., art. L. 3121-65.
Ces dispositions sont de nature à assurer le respect, par l'employeur, de l'exigence d'une charge de travail raisonnable C. trav., art. L. 3121-60. Il ne s'agit toutefois que d'un socle de garanties à respecter, l'employeur pouvant tout à fait instaurer des garanties supplémentaires ou plus protectrices.
Attention
La réaction de l'employeur face à une charge de travail excessive n'est suffisante que s'il assure au préalable un suivi régulier de la charge de travail des salariés au forfait en jours C. trav., art. L. 3121-60 ; Cass. soc., 6 nov. 2019, nº 18-19.752. C'est grâce à ce suivi qu'il peut identifier les situations problématiques et réagir en temps utile à une situation de surcharge de travail.
Exemple
La mise à disposition d'un outil de suivi des journées travaillées et non travaillées n'est pas en soi suffisante pour considérer que l'employeur respecte son obligation de suivi et de régulation de la charge de travail. Ainsi, l'exigence d'une charge de travail raisonnable n'est pas remplie si les données fournies par cet outil ne sont analysées qu'une fois par an au moment de l'entretien annuel sur la charge de travail Cass. soc., 30 sept. 2020, nº 18-24.956.
Comment s'effectue le décompte des jours travaillés ?
La durée du travail des salariés au forfait en jours doit être décomptée chaque année en récapitulant :
- le nombre de journées ou demi-journées travaillées
- par chaque salarié C. trav., art. D. 3171-10.
Les modalités de ce décompte sont prioritairement prévues par accord collectif. En l'absence d'accord collectif, l'employeur doit établir un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées. Sous la responsabilité de l'employeur, ce document peut être renseigné par le salarié C. trav., art. L. 3121-65.
Astuce
L'accord collectif peut organiser le décompte des journées et demi-journées travaillées sous plusieurs formes :
- un document récapitulatif des journées ou demi-journées travaillées établit par l'employeur ou le supérieur hiérarchique du salarié concerné
- un document rempli par le salarié lui-même récapitulant les journées et demi-journées travaillées ainsi que les journées et demi-journées de repos, contrôlé par l'employeur ou le supérieur hiérarchique
- un logiciel ou une « pointeuse numérique » permettant au salarié de déclarer ses journées ou demi-journées de travail C. trav., art. L. 3121-64.
Remarque
L'employeur n'a pas à décompter les heures de travail étant donné que les salariés aux forfaits jours sont exclus des dispositions légales relatives à la durée légale et aux durées maximales de travail. Cependant, l'obligation de respecter les durées minimales de repos demeure (voir question dédiée).
Comment s'assurer que les stipulations de l'accord collectif sur la charge de travail sont suffisantes ?
L'accord collectif Accord d'entreprise, d'établissement ou de branche. L'accord d'entreprise ou d'établissement prime sur celui de la branche. autorisant les forfaits en jours doit déterminer :
- les modalités selon lesquelles l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié
- les modalités selon lesquelles l'employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié, sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sur sa rémunération ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise C. trav., art. L. 3121-64.
Attention
C'est l'employeur qui est responsable du suivi et de la régulation de la charge de travail. Si l'accord collectif est insuffisant sur ce point, l'employeur doit palier ces manquements. Il peut, par exemple, suivre les dispositions applicables en l'absence d'accord collectif (voir question dédiée) en plus des stipulations de l'accord.
Les accords collectifs suffisamment protecteurs sont ceux qui prévoient le suivi régulier, par l'employeur, de la charge de travail du salarié au forfait en jours, au moyen de données recueillies au fil de l'eau et non seulement lors d'entretiens périodiques. Il faut que l'accord prévoit des garde-fous qui permettent à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable de travail Cass. soc., 8 nov. 2017, nº 15-22.758 ; Cass. soc., 17 janv. 2018, nº 16-15.124 ; Cass. soc., 6 nov. 2019, nº 18-19.752.
Exemple
L'accord est assez protecteur lorsqu'il :
- impose un décompte des journées et demi-journées travaillées sur la base d'un système auto-déclaratif
- prévoit un suivi régulier de l'organisation du travail par la hiérarchie, qui veille notamment aux éventuelles surcharges de travail. Dans le cas où une situation de surcharge est détectée, il y a lieu de procéder à une analyse de la situation, de prendre le cas échéant toutes les dispositions adaptées pour respecter, en particulier, la durée minimale de repos quotidien et de ne pas dépasser le nombre de jours travaillés prévu par le forfait
- précise que la charge de travail confiée et l'amplitude de la journée d'activité en résultant doivent permettre à chaque salarié de prendre obligatoirement leur repos quotidien Cass. soc., 17 déc. 2014, nº 13-22.890.
En revanche, n'est pas suffisamment protecteur, l'accord collectif qui prévoit que :
- dans l'année de conclusion de la convention de forfait, la hiérarchie devra examiner avec le cadre concerné sa charge de travail et les éventuelles modifications à y apporter, que cet entretien fera l'objet d'un compte rendu visé par le cadre et son supérieur hiérarchique
- que les années suivantes, l'amplitude de la journée d'activité et la charge de travail du cadre seront examinées lors de l'entretien professionnel annuel
- que les jours travaillés et les jours de repos feront l'objet d'un décompte mensuel établi par le cadre et visé par son supérieur hiérarchique, qui devra être conservé par l'employeur pendant une durée de 5 ans.
Ces dispositions ne sont pas suffisantes en ce qu'elles ne prévoient pas de suivi effectif et régulier par la hiérarchie des états récapitulatifs de temps travaillé transmis, permettant à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable. Ainsi l'accord n'est pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail du salarié.
Pour d'autres exemples : voir le tableau Exemples des mesures conventionnelles de suivi et de régulation de la charge de travail.
À quoi renvoie la notion de charge de travail ?
La notion de charge de travail ne fait l'objet d'aucune définition légale. L'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) l'envisage comme un descripteur global et synthétique de l'activité, qui permet de tenir compte à la fois des aspects physiques et psychologiques du travail. La charge de travail ne doit pas être limitée à la quantité ou à la durée de travail, ni à son intensité.
Le modèle développé par l'ANACT est centré sur trois dimensions de la charge de travail :
- la charge de travail prescrite renvoie au système de contraintes qui s'impose au salarié : objectifs, procédures prescrites, contrôle du travail, mais également aux outils, procédures et ressources mis à la disposition des travailleurs pour réaliser le travail demandé
- la charge de travail réelle permet de mesurer l'écart, inévitable, entre le travail prescrit et le travail tel qu'il réellement exécuté. Étudier la charge réelle de travail permet de rechercher le degré de mobilisation physique, cognitive et psychique d'un individu, et de tenir compte des stratégies et efforts déployés par ce dernier pour atteindre les objectifs prescrits
- la charge de travail ressentie fait appel à la subjectivité des travailleurs puisqu'elle désigne la perception que ce dernier a de sa propre charge de travail. Elle mobilise des notions tels que le sens au travail, la reconnaissance, le jugement de beauté, d'utilité…
La charge de travail est ainsi déterminée par l'analyse des contraintes induites par le travail et des ressources à la disposition de ceux qui l'exécutent. Les contraintes (objectifs, quantitatifs et qualitatifs, délais, organisation et conditions de travail, durée du travail…) ne suffisent pas à évaluer la charge de travail car elles sont supportées différemment par les individus, en fonction de leurs ressources, collectives (outils de travail, possibilités de coopération) et individuelles (autonomie, formation, compétences…). Une entreprise peut donc agir sur la charge de travail en limitant les contraintes liées au travail ou en octroyant de nouvelles ressources aux salariés pour faire face à ces contraintes.
Quels outils et mécanismes peuvent concrètement être mis en place dans l'entreprise pour assurer une régulation de la charge de travail ?
La régulation de la charge de travail peut se faire au moyen de plusieurs outils qui seront utilisés à différents moments de la relation de travail.
L'employeur peut chercher à réduire les facteurs de contraintes dès la prescription des tâches et de l'organisation du travail :
- en fixant des objectifs raisonnables, afin que le travail puisse être réalisé dans les délais impartis. À noter que les objectifs fixés doivent toujours être réalisables, raisonnables et compatibles avec le marché Cass. soc., 13 janv. 2009, nº 06-46.208 ; Cass. soc., 10 févr. 2004, nº 01-45.216
- en s'assurant que les exigences quantitatives sont conciliables avec les exigences qualitatives
- en repensant les procédures et techniques de travail afin de limiter les dysfonctionnements
- en réorganisant les espaces de travail (bruit, nuisances, interruptions liées au travail en open space, etc.).
L'employeur peut agir sur les ressources à la disposition des travailleurs pour réaliser le travail :
- en fournissant au salarié les moyens nécessaires pour réaliser les objectifs prescrits Cass. soc., 2 mars 2011, nº 08-44.977
- en adaptant les moyens matériels (machines, logiciels…) et humains (composition des équipes de travail et possibilité de coopération) aux contraintes de travail
- en permettant à chaque salarié d'être formé pour réaliser le travail demandé. En cela, l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail C. trav., art. L. 6321-1 ; Cass. soc., 25 févr. 1992, nº 89-41.634
L'employeur peut chercher à comprendre les écarts entre le travail prescrit et le travail réel (voir question dédiée) afin d'avoir conscience des effets de la prescription du travail sur la charge de travail des salariés :
- en créant des dispositifs d'alerte, afin que les salariés puissent informer la hiérarchie rapidement lorsqu'ils considèrent que le travail ne sera pas réalisable dans le cadre d'une durée de travail raisonnable
- en mettant en place des espaces de discussion, formels ou informels, physiques ou virtuels, afin que les salariés puissent s'exprimer sur leur travail
- en repensant les modalités de l'évaluation individuelle des salariés, afin de ne plus se demander si les objectifs ont été atteints, mais plutôt, le cas échéant, pourquoi ils n'ont pas été atteints.
L'employeur peut enfin envisager la charge de travail raisonnable sous l'angle de la charge de travail ressentie par les salariés :
- en améliorant les systèmes de reconnaissance du travail réalisé, symbolique (reconnaissance par les pairs, feed-back positif lorsque le travail est bien fait) ou matérielle (rémunération adéquate au regard des contraintes de travail C. trav., art. L. 3121-61
- en agissant sur les ressorts de la motivation au travail (utilité du travail réalisé, diversité des tâches, possibilité de mobiliser ses compétences, possibilité de conciliation entre vie privée et vie professionnelle…).
Astuce
Pour réguler la charge de travail, des espaces de discussion sur le travail peuvent être envisagés (ils peuvent prendre la forme d'entretiens individuels mais aussi d'espaces de discussion collectifs), tandis que l'employeur peut chercher à identifier tous les éléments de nature à perturber le travail des salariés (surcharge informationnelle, réunions trop nombreuses, injonctions contradictoires, etc.).
À quelles conditions une charge de travail peut-elle être considérée comme raisonnable ?
De façon générale, il est possible de considérer que la charge de travail est raisonnable dès lors que :
- des objectifs réalistes et réalisables sont fixés
- les ressources à la disposition des travailleurs sont suffisantes et en adéquation avec les contraintes induites par leur travail, tout en lui assurant de bonnes conditions de travail et une durée raisonnable de travail Cass. soc., 13 janv. 2009, nº 06-46.208 ; Cass. soc., 10 févr. 2004, nº 01-45.216.
Les juges apprécient le respect par l'employeur de son obligation d'assurer une charge de travail raisonnable à la lumière des moyens à sa disposition pour corriger une charge de travail excessive, déraisonnable. L'objectif est avant tout de garantir que la durée du travail ne risque pas de devenir excessive. Il s'agit de prévenir les dérives, les abus liés à la flexibilité offerte par le régime juridique du forfait en jours.
Comment l'employeur doit-il garantir le droit à la déconnexion en l'absence de dispositions conventionnelles ?
Le droit à la déconnexion renvoie au droit à ne pas répondre aux sollicitations numériques en dehors des heures du travail. Il s'agit d'une application spécifique aux outils numériques du droit à un repos continu, quotidien et hebdomadaire.
Le droit à la déconnexion doit être organisé par accord collectif ou par l'employeur unilatéralement :
- l'accord collectif organisant le recours au forfait en jours doit déterminer les modalités selon lesquelles le salarié peut exercer son droit à la déconnexion C. trav., art. L. 3121-64. En l'absence de telles dispositions conventionnelles sur ce point, les modalités d'exercice par le salarié de son droit à la déconnexion doivent être définies par l'employeur et communiquées aux salariés C. trav., art. L. 3121-65
- dans les entreprises soumises à l'obligation annuelle de négociation Entreprises dans lesquelles sont constituées une ou plusieurs sections syndicales , si aucun accord n'a été conclu collectif, l'employeur a l'obligation d'élaborer une charte traitant de cette question, qu'il doit soumettre à l'avis consultatif du CSE. Cette charte doit définir les modalités de l'exercice du droit à la déconnexion et prévoir la mise en œuvre, à destination des salariés et du personnel d'encadrement et de direction, d'actions de formation et de sensibilisation à un usage raisonnable des outils numériques C. trav., art. L. 2242-17.
Différentes mesures peuvent être envisagées par les entreprises :
- une injonction de ne pas envoyer de courriels en dehors des horaires de travail et un droit de ne pas y répondre
- une suppression des courriels envoyés à un salarié absent avec avertissement de l'expéditeur
- une déconnexion forcée par une fermeture des serveurs le soir, la nuit et le week-end
- l'instauration d'un devoir de déconnexion à la charge du salarié
- la possibilité d'alerter le supérieur hiérarchique en cas de situation problématique
- un relevé du temps passé à répondre à des courriels en dehors du temps de travail.
Les risques liés à l'hyperconnexion doivent également être prévenus plus en amont par :
- une formation des salariés, et notamment des managers, sur l'usage des technologies de l'information et de la communication
- des mesures visant à réguler la charge de travail afin qu'elle reste raisonnable.
Remarque
Une déconnexion technique et forcée peut s'avérer contre-productive à long terme, si elle ne fait que décaler dans le temps le travail que le salarié doit réaliser. L'effectivité du droit à la déconnexion passe avant tout par la garantie que le salarié peut réaliser le travail demandé dans les délais impartis, tout en bénéficiant d'une durée du travail raisonnable lui permettant de concilier vie privée et vie professionnelle.
Quel est le rôle du salarié dans la régulation de sa charge de travail ?
Bien qu'il ne soit pas directement responsable de la régulation de sa charge de travail, qui incombe à l'employeur, le salarié ne doit pas rester totalement passif :
Le salarié doit contribuer à l'efficacité des dispositifs de régulation de la charge de travail instaurés par accord collectif ou unilatéralement par l'employeur :
- en déclarant précisément les journées et demi-journées travaillées ainsi que les journées et demi-journées de repos
- en ne taisant pas les difficultés liées à la charge de travail lors de l'entretien annuel
- en mettant à profit les espaces de discussions, s'ils existent.
L'autonomie du salarié au forfait en jours rend difficile une connaissance parfaite par l'employeur du travail réalisé. Une participation active du salarié aux dispositifs de régulation de la charge de travail est indispensable pour permettre à l'employeur de prescrire le travail avec plus de justesse ou d'adapter les ressources à la disposition du salarié pour faire face aux contraintes induites par le travail.
Le salarié est débiteur d'une obligation de sécurité : conformément aux instructions qui lui sont données par l'employeur, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail C. trav. art. L. 4122-1.
Cette obligation est d'une intensité moindre que celle dont est débiteur l'employeur, elle est sans incidence sur le principe de responsabilité de ce dernier Cass. soc., 13 juin 2019, nº 18-11.115. Elle justifie toutefois une sanction du salarié, qui a une conduite dangereuse pour lui ou pour ses collègues Cass. soc., 30 sept. 2005, nº 04-40.625 ; Cass. soc., 8 mars 2017, nº 15-24.406.
En vertu de cette obligation, le salarié :
- ne doit pas être négligent dans l'accomplissement de son travail, afin que sa charge de travail ne soit pas transférée vers ses collègues
- ne doit pas se mettre volontairement dans une situation de surcharge de travail. En effet, le salarié qui ne respecte pas les jours de travail définis dans son contrat de travail fait preuve d'un comportement d'insubordination caractérisée, de nature à entraîner la mise en jeu de la responsabilité pénale de l'employeur pour infraction à la règle du repos hebdomadaire. Il commet une faute pouvant justifier un licenciement Cass. soc., 26 juin 2012, nº 11-13.249.
Attention
Une telle sanction ne se justifie que dans des situations de surcharge de travail volontaire qui sont, en pratique, très marginales. Ce n'est pas le cas lorsque la surcharge de travail résulte de la prescription de nombreuses tâches, d'objectifs difficilement atteignables, de ressources inadaptées au travail à réaliser, voire d'une culture d'entreprise favorisant le présentéisme ou l'accomplissement d'une quantité de travail toujours plus importante.
En cas de surcharge de travail, le salarié peut utiliser son droit d'alerte, voire son droit de retrait :
- le droit d'alerte permet au travailleur d'alerter immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection
- le droit de retrait lui donne la possibilité de se retirer d'une telle situation C. trav., art. L. 4131-1. Le droit de retrait ne peut être exercé que dans des situations critiques, lorsque la surcharge de travail présente un risque grave pour la santé des travailleurs, en raison par exemple de la fatigue qu'elle engendre et du risque élevé d'accident – du travail, de la circulation – qui en résulte. Le droit de retrait peut également être mobilisé lorsque l'employeur surcharge volontairement un salarié, ce comportement pouvant recevoir la qualification de harcèlement moral. En dehors de ces cas extrêmes, en situation de surcharge ponctuelle, le dialogue avec l'employeur semble plus pertinent qu'un retrait du poste de travail.
Attention
Le salarié peut, en cas de surcharge ponctuelle, demander des dommages-intérêts à l'employeur s'il considère que sa rémunération est sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées C. trav., art. L. 3121-61.
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Exemples de mesures conventionnelles de suivi et de régulation de la charge de travail
L'accord collectif ne prévoit pas de mesures suffisantes | Les dispositions conventionnelles sont suffisantes |
L'accord se borne à rappeler l'obligation de respecter les durées minimales de repos Cass. soc., 31 janv. 2012, nº 10-19.807 ; Cass. soc., 7 juill. 2015, nº 13-26.444
| L'accord prévoit que :
|
Les accords ne prévoient que :
| L'accord prévoit :
|
L'accord qui prévoit que :
Ces dispositions ne sont pas suffisantes en ce qu'elles ne prévoient pas de suivi effectif et régulier par la hiérarchie des états récapitulatifs de temps travaillé transmis, permettant à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable. Ainsi l'accord n'est pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail du salarié Cass. soc., 6 nov. 2019, nº 18-19.752Cass. soc., 13 oct. 2021, nº 19-20.561. | L'accord :
|
L'accord impose que la charge de travail confiée au salarié ne le contraigne pas à travailler plus de 10 heures par jour et 48 heures par semaine Cass. soc., 14 mai 2014, nº 12-35.033 ; Cass. soc., 15 avr. 2016, nº 15-12.588
|
|
L'accord n'envisage qu'une amplitude de 10 heures par jour au maximum, sauf surcharge exceptionnelle, ainsi qu'un bilan dressé chaque trimestre par le salarié pour remédier aux éventuels excès Cass. soc., 13 nov. 2014, nº 13-14.206. |
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Le forfait en jours dans l'entreprise
Aucun accord collectif ne peut alléger cette obligation de contrôle et de régulation de la charge de travail C. trav., art. L. 3121-60
La réaction de l'employeur face à une charge de travail excessive n'est suffisante que s'il assure au préalable un suivi régulier de la charge de travail des salariés au forfait en jours C. trav., art. L. 3121-60 ; Cass. soc., 6 nov. 2019, nº 18-19.752. C'est grâce à ce suivi qu'il peut identifier les situations problématiques et réagir en temps utile à une situation de surcharge de travail.
C'est l'employeur qui est responsable du suivi et de la régulation de la charge de travail. Si l'accord collectif est insuffisant sur ce point, l'employeur doit palier ces manquements. Il peut, par exemple, suivre les dispositions applicables en l'absence d'accord collectif (voir question dédiée) en plus des stipulations de l'accord.
Une telle sanction ne se justifie que dans des situations de surcharge de travail volontaire qui sont, en pratique, très marginales. Ce n'est pas le cas lorsque la surcharge de travail résulte de la prescription de nombreuses tâches, d'objectifs difficilement atteignables, de ressources inadaptées au travail à réaliser, voire d'une culture d'entreprise favorisant le présentéisme ou l'accomplissement d'une quantité de travail toujours plus importante.
Le salarié peut, en cas de surcharge ponctuelle, demander des dommages-intérêts à l'employeur s'il considère que sa rémunération est sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées C. trav., art. L. 3121-61.
L'accord collectif peut organiser le décompte des journées et demi-journées travaillées sous plusieurs formes :
- un document récapitulatif des journées ou demi-journées travaillées établit par l'employeur ou le supérieur hiérarchique du salarié concerné
- un document rempli par le salarié lui-même récapitulant les journées et demi-journées travaillées ainsi que les journées et demi-journées de repos, contrôlé par l'employeur ou le supérieur hiérarchique
- un logiciel ou une « pointeuse numérique » permettant au salarié de déclarer ses journées ou demi-journées de travail C. trav., art. L. 3121-64.
Pour réguler la charge de travail, des espaces de discussion sur le travail peuvent être envisagés (ils peuvent prendre la forme d'entretiens individuels mais aussi d'espaces de discussion collectifs), tandis que l'employeur peut chercher à identifier tous les éléments de nature à perturber le travail des salariés (surcharge informationnelle, réunions trop nombreuses, injonctions contradictoires, etc.).
Codes, lois et réglementation
Code du travail, Article L. 4122-1
Code du travail, Article L. 4131-1
Code du travail, Article L. 3121-60
Code du travail, Article L. 3121-61
Code du travail, Article L. 3121-64
Code du travail, Article L. 3121-65
Code du travail, Article D. 3171-10
Code du travail, Article L. 2242-17
Code du travail, Article L. 6321-1
Jurisprudence
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 918 du 25 février 1992, Pourvoi nº 89-41.634
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1945 du 30 septembre 2005, Pourvoi nº 04-40.625
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 7 du 13 janvier 2009, Pourvoi nº 06-46.208
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 340 du 10 février 2004, Pourvoi nº 01-45.216
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 589 du 2 mars 2011, Pourvoi nº 08-44.977
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1656 du 29 juin 2011, Pourvoi nº 09-71.107
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 276 du 31 janvier 2012, Pourvoi nº 10-19.807
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1561 du 26 juin 2012, Pourvoi nº 11-13.249
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 846 du 24 avril 2013, Pourvoi nº 11-28.398
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 816 du 30 avril 2014, Pourvoi nº 13-11.034
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 948 du 14 mai 2014, Pourvoi nº 12-35.033
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2073 du 13 novembre 2014, Pourvoi nº 13-14.206
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2402 du 17 décembre 2014, Pourvoi nº 13-22.890
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 230 du 4 février 2015, Pourvoi nº 13-20.891
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1239 du 7 juillet 2015, Pourvoi nº 13-26.444
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 792 du 15 avril 2016, Pourvoi nº 15-12.588
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2350 du 14 décembre 2016, Pourvoi nº 15-22.003
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2333 du 15 décembre 2016, Pourvoi nº 14-29.701
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 447 du 8 mars 2017, Pourvoi nº 15-24.406
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1039 du 22 juin 2017, Pourvoi nº 16-11.762
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 2405 du 8 novembre 2017, Pourvoi nº 15-22.758
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 64 du 17 janvier 2018, Pourvoi nº 16-15.124
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1809 du 19 décembre 2018, Pourvoi nº 17-18.725
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 99 du 23 janvier 2019, Pourvoi nº 17-22.148
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 954 du 13 juin 2019, Pourvoi nº 18-11.115
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1533 du 6 novembre 2019, Pourvoi nº 18-19.752
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 759 du 30 septembre 2020, Pourvoi nº 18-24.956
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 834 du 30 septembre 2020, Pourvoi nº 19-11.706
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 1148 du 13 octobre 2021, Pourvoi nº 19-20.561
Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt nº 261 du 2 mars 2022, Pourvoi nº 20-16.683